jeudi

ATELIER D'ECRITURE

La photo est de Jean-Sébastien MONZANI


Incipit : "Ma voiture n'a pas démarré ce matin"
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Ensemble : toujours vers "plus"


- Ma voiture n'a pas démarré ce matin, déclame le premier.
- ma voiture n'a pas démarré hier, poursuit le second.
- ma voiture ne démarre plus depuis trois jours, ânonne le troisième.
- ma voiture n'a jamais démarré, continue le quatrième.
- ma voiture n'a plus de moteur, prolonge le cinquième
- ma voiture est un tas de boue, s'obstine le sixième.

Fin de la première rangée.

Chacun regarde le manuel qu'on lui a remis, où figure la photo d'une de ces anciennes voitures qui rappelle des vieux souvenirs d'enfance.

Je pense : Mais qu'est-ce que c'est que ce cirque ! Vous verrez, m'avait dit le nouveau directeur, c'est un stage de motivation très novateur. Il faut que vous le suiviez au même titre que tous les ouvriers de l'usine. C'est indispensable que vous connaissiez les nouvelles méthodes que nous avons adoptées.

Deuxième rangée des ouvriers :

- je veux une voiture qui démarre, éructe le premier
- je veux une voiture qui démarre tous les jours, proclame le second
- je veux une voiture performante, vitupère le troisième
- je veux une voiture avec un moteur haut de gamme, clame le quatrième

Je pense : ce n'est quand même pas possible que l'on en soit arrivé là. Quand on a été racheté par les Indochinojaponais, il était clairement décidé qu'ils s'adapteraient à nos propres méthodes de management. Pas l'inverse.

Les deux dernières rangées d'ouvriers : en choeur, martelant chaque phrase en lisant le manuel :

- Chez RenaultYota
je serais un bon gars
auto solide on fera
pour le patron on trimera
les congés on refusera
chaque voiture démarrera
sinon on se trucidera

Je suis au milieu d'eux, je ne sais comment réagir. Je ne peux quand même pas me taire devant de telles méthodes, moi l'ancien patron ! Moi qui dirigeais notre empire automobile depuis sept générations !

Tout à coup, à l'arrière une détonation de revolver.
Chacun plonge le nez dans son livre.

Dans le fond de la pièce, j'entends la voix tonitruante du manager principal beugler :

Mauvais ouvrier,
toujours supprimé !